Article publié en Février 1995 sur Liquid Lava
Pionnier incontesté de la House, et responsable du contagieux et acidulé « Oochy Koocky » – qui selon la légende fit exploser la sono du Heaven à Londres – sans compter de nombreux autres bijoux kitsch, Peter Ford a su dès ses débuts créer un univers propre, étrange et envoutant. Depuis la déconfiture de Rhythm King, cet electronic disco semblait avoir disparu. Pas du tout..
On a vu réapparaitre le nom de Baby Ford sur des flyers en tant que DJ. Entre temps, son orientation musicale avait évoluée comme on a pu le remarquer avec la sortie des Minimal Man – où était également présent Ian Loveday de Eon. Sa musique s’est mutée en une Techno torturée aux accents glauquesques mais toujours aussi détonante que ses productions passées. Une nouvelle orientation qui se trouve aujourd’hui confirmée avec nouveau label Ifach Records, véritable creuset de multiples productions variées et atypiques. Interview feutrée de Peter Ford, un garçon qui de la Musique…
Liquid Lava : Peux-tu nous faire une brève présentation du label ?
Baby Ford : Nonolense / Dead Eye, le premier disque est sorti en Mars 94. Je venais de mixer à Tokyo et Osaka – je n’avais pas encore réellement de concept, d’idée de base, j’avais juste quelques titres prêts à sortir, pour lesquels Mark Broom et moi avons travaillé ainsi que d’autres réalisés avec Ian Loveday (aka Eon) entre autres. D’ailleurs Eon a participé au premier Ifach.
On, c’est à dire Mark et moi, travaille depuis quelques années ensemble comme DJs et musiciens. Durant l’hiver 93 nous avons joué au Nude, un club underground ouvert le dimanche à Londres. Dave Angel, Colin Dale et bien d’autres y jouaient aussi mais cela n’a pas vraiment pris. Parfois les goûts des londoniens me laissent songeurs (fashion!). Ce fut tout de même une expérience intéressante, le point de départ de Ifach.
Qui sont les artistes qur Ifach ?
Mark Broom, DJ du East London, Ed et Andy de Black Dog, Dave un ami de Mark et moi. On compose les morceaux à cinq, on les produit à cinq. Pas d’égo, un travail collectif où chacun participe aux morceaux de l’autre, modifie les séquences, les sons. Ce n’est pas un concept, pour nous c’est juste la meilleure façon de travailler, de trouver le plus d’inspiration.
Pourquoi avoir créé Ifach Records et surtout pourquoi avoir attendu aussi longtemps ?
Pourquoi avoir attendu aussi longtemps ? Tout simplement à cause de l’argent le nerf de la guerre. C’est en partie mon travail de DJ qui m’a permis de démarrer Ifach. Le label est la suite logique de mon travail de création. Je ne vois pas l’intérêt de travailler sur de la musique, d’y mettre son âme et après de la laisser dormir dans un tiroir. Ifach a été monté pour contrôler l’élaboration des disques de A à Z. J’ai voulu sortir du schéma classique maison de disque / producteur / label manager que j’avais vécu.. et ne pas renouveler.
Pourquoi avoir appelé le label Ifach ?
Il y a plusieurs origines à ce nom, c’est tout d’abord une référence à une montagne espagnole « Penon de Ifach », un nom qui m’a marqué inconsciemment, qui m’est revenu à l’esprit au moment de la création du label. Mark a une autre explication : Ifach lui rappelle les colonies de vacances (!), tout une période de notre vie qu’on aime bien. Qu’est-ce que cela veut dire, après tout c’est juste un nom…
Comment choisis-tu les morceaux que tu sors sur le label ?
Cela n’a rien de sorcier : exactement de la même façon que lorsque tu vas acheter tes disques. L’important c’est avant tout savoir prendre du recul, notamment envers ses propres productions, rester modeste. Un tel était d’esprit s’acquiert avec le temps, tout comme à la longue tu arrives à discerner dans les magasins de disques ce qui est bon du reste… Tu finis par développer un instinct qui te guide dans la musique. Après ce choix préliminaire, on s’assied autour d’une tasse de café et on réécoute.. jusqu’à se former une opinion définitive.
Le son Ifach ?
Je ne crois pas avoir de définition particulière de mon son, tu ferais mieux d’interroger ceux qui achètent mes disques, chacun a sa propre interprétation de la musique, je ne peux pas me prononcer. On cherche à créer des titres fonctionnels avec, je l’espère, un certain feeling. Tout le reste c’est à l’auditeur de voir.
Comment se fait-il que tes disques restent difficiles à trouver en France ?
Cela tient tout simplement au petit nombre de copies que je presse de chaque disques : 1000 exemplaires. 600 pour le Royaume-Uni et 400 pour l’export.
Cet article a été publié originellement sur le fanzine Liquid Lava, en Février 1995.