Titre : Alien 3 par William Gibson, le scénario abandonné
Auteurs : William Gibson, Johnnie Christmas, Tamra Bonvillain
Format : BD
Sortie chez : Vestron Comics
Lorsqu’il est contacté par les producteurs des deux premiers volets de la saga Alien, William Gibson, alors au faîte de sa gloire avec la trilogie neuromantique, accepte de s’y atteler, malgré sa totale inexpérience en la matière, simplement parce qu’il est fan des films réalisés pour la série par Ridley Scott et James Cameron et qu’il lui tient à cœur d’apporter une vision fidèle à l’univers d’Alien, sans se rendre compte que lesdits producteurs ne l’avaient contacté que pour ajouter son nom au projet, éventuellement donner un vernis cyberpunk à un scénario qui serait largement réécrit ensuite. De grève des scénaristes en réécritures continuelles, Gibson fut peu à peu écarté du projet qui passa entre les mains du bourrin Renny Harlin, puis celles de David Twohy et Vincent Ward, avant d’échoir à David Fincher, avec un scénario bancal rassemblant toutes sortes d’éléments épars pour ce qui n’est finalement qu’un film de prison dans l’espace. Déçu par l’expérience, dépouillé d’Alien au point qu’il ne restera de sa contribution au scénario que les codes barres tatoués sur les prisonniers, William Gibson ne se risquera plus à l’écriture de scénariis, et son traitement, réputé bien meilleur que l’officiel réapparaitra de temps à autres sur le net, laissant à chacun le choix d’imaginer “son” film à partir du script. Il en sera ainsi jusqu’à ce que Dark Horse Comics décide, vingt neuf ans plus tard, de mettre cet Alien 3 inédit en images sous la plume de Johnnie Christmas (Sheltered).
Bien plus proche des premiers films, cette version d’Alien 3 démarre lorsque le vaisseau Sulaco, transportant Hicks, Newt, Ripley dans le coma et un Bishop très endommagé est détourné sur la station Anchorpoint, appartenant à la société Weyland Yutani. Alors que leur sort devient l’enjeu d’un conflit entre factions politiques, les chercheurs de la compagnie cherchent à opérer des mutations génétiques sur les aliens découverts pour les transformer en armes de guerre. Évidemment, le carnage ne tarde pas à commencer. On le voit, cette version d’Alien 3, qui reprend les figures essentielles de la saga, de la firme corrompue aux massacres d’innocents dans des couloirs métalliques, ne renouvelle pas la franchise, comme a pu le faire, malgré tous ses défauts, le film de Fincher. Le trait de Christmas, dynamique, précis et gore lorsqu’il le faut, s’empare de l’univers d’Alien pour une BD claustrophobe et paranoïaque, aux implications multiples et saisit bien l’angoisse des chercheurs comme des “soutiers” d’Anchorpoint face aux manipulations de Weyland Yutani, tout en donnant à l’androïde Bishop le rôle de choix qu’il mérite. On se prend vite à rêver à ce qu’auraient pu donner les versions suivantes d’Alien si les producteurs avaient choisi l’imaginaire de Gibson plutôt que la voie de garage où ils sont aller échouer la franchise.